Hedy Lamarr, star ingénieuse

Hedy Lamarr de son vrai nom Hedwig Eva Maria Kiesler, est née à Vienne en novembre 1914. Elle a grandi dans un milieu privilégié, sa famille faisant partie de la haute bourgeoisie juive viennoise. Elle est dotée d’une intelligence hors du commun et son père banquier aime à cultiver cette intelligence. Petite, lors de leurs promenades, ils discutent d’économie, de mathématiques. C’est une enfant très curieuse. Elle veut savoir comment les choses fonctionnent et son père lui explique tout. A l’école, sa matière préférée est la chimie. A une autre époque, peut-être aurait-t-elle été scientifique.
Elle est également élevée dans un milieu dans lequel la culture, l’art, le théâtre sont prépondérants.
Intrépide et dotée d’un fort caractère, elle décide à 16 ans de faire du cinéma et commence à tourner dans des films. En 1933, elle se fait connaître dans le monde entier en apparaissant nue dans le film Extase. Elle y simule une scène d’orgasme, chose que personne n’avait jamais encore faite au cinéma. Cela a fait scandale et lui donne une réputation sulfureuse qui ne la quittera plus.


Sa carrière d’actrice se poursuit aux Etats-Unis. Elle y enchaîne les films à succès et devient au début des années 40, une véritable star hollywoodienne que l’on qualifie de « plus belle femme du monde ».
« […] elle était si époustouflante que toutes les conversations s’interrompaient dès qu’elle entrait dans une pièce […] elle devenait le point de mire de tous les regards […] Tout le monde était trop occupé à la fixer bouche bée » écrira George Sanders dans les Mémoires d’une fripouille.
Malgré des journées très longues et éreintantes passées sur les plateaux de cinéma, le soir, elle continue de travailler sur ses inventions. C’est son hobbie et elle a même, chez elle, un atelier tout équipé pour faire ses expérimentations. 
Mais à cette même époque, la guerre fait rage en Europe et en septembre 1940, un paquebot transportant 87 enfants se fait torpiller par des sous-marins allemands.
Hedy, jeune immigrée juive autrichienne, touchée par les horreurs de la guerre et très patriote vis-à-vis des Etats-Unis son pays d’adoption, imagine une torpille téléguidée dont elle cherche à sécuriser la communication du téléguidage. En effet, une torpille dont l’ennemi arriverait à brouiller trop facilement le téléguidage ne servirait à rien.
Aidée du compositeur de piano George Antheil, spécialiste du piano mécanique (piano qui utilise des partitions à trous), ils développent l’idée suivante : Pour téléguider une torpille, au lieu d’utiliser une fréquence d’émission unique , facile à brouiller par l’ennemi, ils imaginent « le saut de fréquence », un système consistant à changer de fréquence de radio-transmission sans arrêt mais de manière synchronisée pour communiquer avec la torpille. Cela évite donc le brouillage et rend presque impossible la détection de la torpille. Ce concept de sécurisation des communications radio est un coup de génie et ce principe est toujours utilisé dans les technologies d’aujourd’hui comme le positionnement des satellites avec les GPS, les liaisons chiffrées militaires, dans la technique du WIFI.


Hedy et Goerge déposent leur brevet en 1941 et le donnent en accès libre de droit à l’armée américaine. Comme ces inventeurs ne sont pas des scientifiques mais des artistes, la NAVY ne les prend pas au sérieux et délaisse cette invention.
Ils demandent à Hedy de retourner à « ce qu’elle fait de mieux » et de participer plutôt à des collectes de fonds pour contribuer à l’effort de guerre, ce qu’elle fera. Elle participe à des galas, divertit les soldats,  vend des obligations (emprunts) de guerre. Elle vend même des bisous à des inconnus pour lever des fonds. Son brevet, lui, enfermé dans un coffre de l’armée et classé secret défense, ne lui rapportera rien.

Hedy retourne donc à ses films. Comme c’est une femme de caractère qui a envie d’être libre, elle décide de réaliser ses propres films, ce qui est mal vu dans le milieu du cinéma.
Malgré le fait qu’elle apparaît encore dans de nombreux films dont Sanson et Dalila, sa carrière bat de l’aile tout comme sa vie personnelle et les nombreux amants et maris qu’elle collectionne.
Elle finit sa carrière et sa vie appauvrie et isolée.

A côté de cela, dans les années 60, pendant la crise de Cuba, la NAVY exhume son brevet et utilise son invention afin de sécuriser les communications entre ses navires. Sauf que depuis 1959, le brevet est tombé dans le domaine public et cette découverte ne rapporte donc pas un sou à Hedy.
Le magazine Forbes affirme, dans un article qu’il lui consacre en 1990, que Hedy aurait pu toucher 30 milliards de dollars si elle n’avait pas offert dès 1941 son brevet à l’armée.
Suite à ces révélations faîtes sur son invention, elle reçoit en 1997, le prix de l’Electronic Frontier Foundation américaine et entre, avec George Antheil, au National Inventors Hall of Fame en 2014. Elle meurt en 2000 en Floride.

Elle aura été payée pour ses films mais jamais pour son invention. Elle ne correspondait pas au cliché d’un scientifique de l’époque : un scientifique, cela doit être un homme et certainement pas une star hollywoodienne. Hedy Lamarr est sans doute un des exemples-types de la mésalliance qu’il existe dans l’esprit des gens, entre l’intelligence et la beauté.  « Ses apparences l’ont souvent desservie » écrira George Antheil dans ses mémoires.

 

Hélène Lafitte

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