Paru en 2019, l’homme qui n’aimait plus les chats est le premier roman d’Isabelle Aupy, une kinésithérapeute bordelaise. L’autrice nous invite à nous plonger dans le quotidien d’une petite île sauvage, balayée par les vents et bercée par les vagues, où vit une petite communauté, en presque totale indépendance. À l’image du narrateur qui pense tendrement à « sa » Louise, chacun a un parcours de vie différent : il y a Thomas le gardien du phare, Léonore l’institutrice retraitée, Sergueï le poète-violoniste, Gwenaëlle, Gaël, Juliette, Myriam, Ludo et bien d’autres personnalités encore. Tous ont fui le continent et son lot de tracas. Ils suivent leurs petites habitudes, se retrouvant le dimanche autour de la même table au restaurant du village et cohabitant avec une nombreuse population de chats.

Or un jour, les félins disparaissent tous, sans explication. Une femme de l’administration arrive alors du continent avec une solution à ce problème.

Mais est-ce vraiment un problème ? La vraie question semble plutôt posée par la « solution »…

C’est cette question qui s’esquisse et se précise tout au long du roman

L’intrigue qui ne fait intervenir aucun élément de science-fiction est très sobre. Le cadre réaliste permet de situer assez précisément le lieu de l’action, cependant, par l’absence de nom propre, il demeure assez vague ce qui laisse au lecteur la possibilité de le modeler selon sa sensibilité. De même les personnages très typés ne sont pas pour autant exubérants. La spontanéité de leurs répliques et le caractère oral du texte souligne leur simplicité si bien que le lecteur les ressent comme des « vrais » gens qui vivent dans la « vraie vie ».

Le lecteur se sent ainsi intégré dans la population et se retrouve donc, comme les personnages, soumis au même cas de conscience. C’est pour cela que ce roman n’est pas seulement un exercice de style. C’est aussi un petit élément de réflexion propre à nourrir le lecteur qui revient nécessairement de l’île avec un esprit plus ouvert et critique. La question posée semble d’abord anodine ou amusante mais se révèle ensuite le premier élément d’une métaphore suggérée que chaque lecteur achève selon sa sensibilité donnant ainsi une large palette de sens au récit.

De part sa forme agréable et intemporelle ainsi que la profondeur de son propos, ce livre mérite donc sans doute d’être de ceux qui passent à la postérité.

En tous cas, ThéoNet vous en recommande vivement la lecture. Nous vous conseillons par ailleurs de prendre une heure et demi à deux heures pour le lire d’une traite, ce qui augmente l’intensité du récit.

Enfin, pour ceux que les « pavés » rebutent : n’ayez pas peur ! Le livre est vraiment très fin (moins de 120 pages) et l’oralité de l’expression du narrateur rend le texte accessible à tous les lecteurs.

Bonne lecture !

Désiré Legay–Daquin